L'orage gronde dehors au beau milieu de la nuit. Allongé dans votre lit vous cherchez désespérément le sommeil, le temps semble long et vous avez l'idée de passer dans votre lecteur audio préféré quelque chose de doux, léger, éthéré semblable à un nuage pour calmer les tracas qui nourrissent votre insomnie. Vous avez pensé à quelque chose d'agréable qui ne pourrait pas vous faire du mal et puis ça a fait "shboum" là dedans. Vous décidez d'écouter « Out of the Night ».
Il est le titre qui conclut le premier album du combo franco-vietnamien. Un mélange peu commun, pour l'histoire ce sont deux frères d'origine vietnamienne Kahn Mai et Taï Sinh, devenant européens, qui travaillent comme professionnel dans la musique (ingénieur du son et maison disques Baclay). Après avoir joué dans un groupe de pop, The Monshoons, à la fin des années 60, ils décident de fonder Taï Phong en recrutant des excellents musiciens français : Jean-Alain Gardet aux claviers, Stéphane Caussarieu à la batterie et pour la voix et la guitare un certain… Jean-Jacques Goldman. Et oui ! Nous avons à faire aux premiers pas dans la musique pour notre chanteur de variété préféré.
Le travail des ambiances et du son est titanesque sur cet album. Très doux et épuré, il faut l'écouter comme un album de pop-rock progressif (très inspiré Pink Floyd pour la musique et Yes pour les voix angéliques). Le groupe connaîtra un succès en France avec le single « Sister Jane » qui cartonnera dans les boîtes de nuit en 1975. Une galette d'une grande sensibilité où le paroxysme de ce sentiment se trouve sur « Out of the Night ».
C'est Kahn Maï qui gère le chant avec une voix angélique pour des paroles assez convenues, voire naïves mais qui restent efficaces (il raconte un rêve au beau milieu de la nuit). Même si le refrain est joli c'est avant tout la musique qui importe. Le son d'orgue Hammond donne un aspect planant avec une batterie au fond du temps, une basse lourde et des chœurs d'une grande beauté.
Le morceau a un schéma classique : couplet – refrain avec des passages expérimentaux comme l'utilisation de synthétiseur moog, des percussions, une boîte à musique, des guitares acoustiques bref les arrangements sont dingues, on découvre toujours un petit détail en plus à chaque écoute.
Et comme si ça ne suffisait pas Jean-Jacques Goldman nous livre un solo de guitare pour le final, et là… c'est la claque.
Si une guitare devait pleurer, pour moi, elle aurait ce son là. Chaque note est une larme qui coule le long de l'instrument. Elle est soutenue par les claviers, la basse et la batterie et lorsque tout ce petit monde décide d'accélérer le rythme… en plus du romantisme s'ajoute une chevauchée fantastique. Un de mes solos préférés (j'en ai plein mais quand même). Jamais Jean-Jacques Goldman ne reproduira un acte de bravoure pareil, ce qui rend ce passage encore plus précieux.
Les larmes de la guitare ont essuyé les tourments de votre âme, vous entendez des notes de piano qui tombent tel des gouttes de pluie. L'orage est loin maintenant, vous êtes enfin apaisés.
Out of the night, écouter le morceau.
Pour aller plus loin : tous les articles "ten minutes song"